Création de la Société d'Encouragement pour l"Industrie Nationale

Soumis par s.saudrais le jeu 04/03/2021 - 04:14
Les encyclopédies

La Société d’Encouragement a repris l’héritage de l’Encyclopédie et des sociétés d’émulation apparues en nombre au temps des Lumières.

  • Les prémices

 

La première Société d’Encouragement pour les manufactures créée en 1731 à Dublin : la  « Dublin Society for Improving Husbandry, Manufacturers and other Usefull Arts », a rapidement démontré son efficacité dans ce pays en ruine et en proie à la famine. Elle est toujours opérationnelle et contribue encore au renouveau économique irlandais.

De même, créée en 1847 à Londres, la « Royal Society for the encouragement of Arts, Manufactures and Commerce » a été considérée comme étant un des facteurs clés du succès économique de la Grande-Bretagne. La RSA est aujourd’hui toujours très active.

Simultanément avec les sociétés créées à Florence et à Erfurt, le parlement de Bretagne, à l’investigation des négociants maritimes nantais et malouins, a créée en 1756 la Société d’Agriculture, des Arts et du Commerce des Etats de Bretagne. Elle fut suivie par celle de Berne en 1759, par une société au Pays Basque en 1764 et une autre en Carinthie en 1765. Près d’une centaine de Sociétés d’Encouragement seront rapidement dénombrées en Europe et dans les deux Amériques.

Le mouvement fut bloqué en France. La Société bretonne se heurta rapidement à l’hostilité violente du pouvoir central, plusieurs de ses membres furent arrêtés ou exilés. Elle cessa d’exister en 1770.

Après la décennie révolutionnaire, faisant suite à plusieurs siècles de malthusianisme corporatiste, à l’exode massif des artisans et manufacturiers protestants après l’édit de Fontainebleau, à la stérilisation imposée aux procédés innovants, dénoncée par les Encyclopédistes. L’agriculture française était en friche, l’industrie étiolée et vieillotte, les voiries délabrées mais les français étaient prêts à répondre aux appels d’une Société d’Encouragement pour entreprendre et investir.

Il faut ajouter l’absence d’une législation de protection des inventions et une décennie de vacances pour cause de révolution.

 

  • Le déclanchement

 

L’agronome de Lasteyrie, qui revenait, en l’an IX de la République, d’un voyage en Europe, où il avait recensé les procédés qui lui paraissaient bon d’introduire en France, se rendit chez le financier Benjamin Delessert «…plusieurs personnes éminentes dans les sciences, l’industrie et l’administration se trouvaient dans les salons de la rue Coq-Héron… ».

De Lasteyrie parla des innovations et initiatives intéressantes qu’il avait remarquées lors de son voyage et surtout d’une Société fondée à Londres en 1754, au Rautwell Coffee House, à l’initiative de William Shipley sous le titre « Société pour l’Encouragement des Arts, des Manufactures et du Commerce ». Il fit ressortir tous les services qu’elle avait, grâce une souscription, rendus à l’industrie anglaise (financements, récompenses, publicité…).

Comme il était nécessaire de rattraper tous les retards, de perfectionner d’urgence l’industrie, d’augmenter sa productivité et l’activer pour espérer un jour entrer en concurrence sur les marchés étrangers avec l’Angleterre et même avec les États Allemands, dopés par les réfugiés protestants français, ayant émigrés après la révocation de l’Édit de Nantes. Ayant exploré le sujet, on reconnut la nécessité de fonder une société d’encouragement à l’instar de celle de Londres et les premières bases de cette création furent immédiatement posées.

 

  • La création

 

On fit circuler une liste d’adhésions et le 12 Vendémiaire an X (4 octobre 1801) une réunion préparatoire eut lieu, quatorze présents signèrent le procès-verbal, Lebrun et Chaptal avaient déjà fait connaître leur soutien. Moins d’un mois après, le 9 Brumaire an X, (31 Octobre 1801), la société tenait, avec un bureau provisoire présidé par Rouillé de l’Etang, sa séance d’ouverture à l’Hôtel de Ville de Paris en présence de 92 personnalités, dont les trois Consuls, 270 souscripteurs s’étant déjà engagés.

En quelques semaines, la liste des souscripteurs s’était couverte de noms considérables. Bonaparte, premier consul, s’inscrivait pour 100 souscriptions : Cambacérès et Lebrun, deuxième et troisième Consuls, pour 12 et 30 souscriptions, Chaptal, ministre de l’Intérieur qui deviendra son premier Président, pour 50 souscriptions. Une centaine d’autres s’inscrivirent pour plusieurs souscriptions. Moins d’une année après, le nombre des souscripteurs dépassait les 900.

C’est ainsi que fut créée la première association en France, bien avant la loi 1901.

  • Pour approfondir :

- Discours fondateur à la séance inaugurale de la Société le 9 brumaire an X de Joseph-Marie Degerando

- Le Conservatoire National des Arts et Métiers et la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale au début du XIXe siècle par René Tresse