Un encouragement multiforme dans la première moitié du XIXe siècle :

Un président marquant : Jean-Antoine Chaptal *ou l’esprit fondateur


Les premières décennies du XIXe siècle sont dominées par la figure du premier président de la Société, Jean-Antoine Chaptal (1756-1832 ; pr. 1801–1832). Savant chimiste notoire, menant parallèlement une carrière industrielle, ayant participé à l’effort de guerre durant la Révolution, il va apporter à la Société d’encouragement son expérience et surtout ses idées fortes : il est intimement convaincu, d’une part, de l’importance d’une industrie dotée d’un appareil productif moderne comme élément de la puissance économique du pays et, d’autre part, de l’importance de la science utile, l’aide que le progrès scientifique peut apporter à l’amélioration des processus de production et à la création de nouveaux produits. Cela ne l’empêche pas de reconnaître l’importance d’un monde artisanal inventif. Son expérience politique et ses réseaux permettront à la Société de traverser sans encombre les changements de régime, en maintenant l’esprit dans lequel elle avait été créée.


Une démarche globale


Les premières décennies du XIXe siècle, durant la première industrialisation, forment le temps de l’Encouragement. Dans un contexte de compétition entre l’économie française, jugée en retard, et les économies étrangères, notamment l’anglaise érigée en modèle, la Société veut promouvoir les moyens techniques, les procédés, les produits qu’elle juge les plus aptes à entraîner le progrès dans la majorité des branches de l’activité productive, en adoptant le meilleur des techniques étrangères et en stimulant l’inventivité des entrepreneurs nationaux, au besoin en leur apportant l’expertise scientifique – la science utile - et technologique qui peut leur faire défaut.

Une veille technologique et une démarche de diffusion actives


Ses experts sont donc constamment sollicités pour identifier, dans une démarche de veille technologique constante et pour présenter, par le canal du Bulletin dont le volume va croissant, les procédés peu ou mal connus en France : les produits ou les procédés étrangers jugés plus perfectionnés ou totalement novateurs - nouvelles machines à vapeur ou textiles, procédés de fabrication de produits métallurgiques ou chimiques, matériels d’optique, nouveaux moyens de transport, biens de consommation -  sont largement mis en avant. La Société incite à leur adoption, mais aussi à leur adaptation aux conditions nationales et à leur amélioration.


                                                                « L’introduction des techniques étrangères : une locomotive Stephenson de 1835 et ses détails ». Bulletin de la Société d’encouragement, vol. 33, 1834, pl. 633.
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Une stimulation de l’inventivité


En parallèle, la Société d’encouragement veut stimuler l’inventivité de tous les acteurs de l’économie, grands entrepreneurs, artisans, mécaniciens, inventeurs, exploitants : elle les pousse à concevoir, à perfectionner ou à développer, parfois de manière incrémentielle, des machines et des outillages, des produits métallurgiques ou chimiques, des biens d’équipement et de consommation originaux, en n’évitant aucune branche d’activité, la plus minime soit-elle.


Une incitation multiforme


Cette volonté inlassable de faire appel aux dynamiques inventives se traduit par l’organisation, durant ces premières décennies, d’une centaine de concours plus ou moins dotés selon l’importance estimée du sujet : ils mettent en compétition les projets et les réalisations, souvent sur la longue durée, ont des termes assez souples pour pouvoir être modifiés en fonction des premiers résultats et sont fréquemment organisés en chaines dont les sujets sont liés. Parallèlement, des inventions présentées par leurs auteurs et jugées particulièrement originales sont récompensées. La prise de brevets, enfin, est également encouragée et parfois financée.

La valorisation des meilleures démarches inventives


Près d’un demi-million de francs-or sont distribués et des noms emblématiques mis à l’honneur durant cette période : Joseph-Marie Jacquard pour le métier à tisser la soie dans les années 1800, Nicolas Appert pour son procédé de conservation alimentaire dans les années 1810, l’industriel Georges Dufaud pour les forges à l’anglaise et Louis Vicat pour les ciments hydrauliques dans les années 1820, Emile Guimet pour son outremer artificiel et Benoit Fourneyron pour sa turbine hydraulique dans les années 1830, Jacques-Mandé Daguerre pour la photographie dans les années 1840. En les consacrant, la Société aide à construire ces figures de l’inventeur qui vont acquérir une si grande importance au XIXe siècle.


« L’encouragement à la mécanisation des activités productives ; le métier Jacquard à tisser la soie »
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ill. 7 : le développement d’une production nationale d’optique]

« L’incitation au développement de l’optique, à la rencontre de la science et de la technique ». Le télescope de Cooper doté d’une lentille de Cauchoix primée par la Société, gravure d’Elridge, 1831.
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Un rôle important dans le développement de grands secteurs industriels

La Société est ainsi considérée comme un des principaux moteurs d’une innovation technique qui permet de développer des branches industrielles entières, comme les arts du feu - verre et céramique, la papeterie, l’industrie agro-alimentaire, les industries du luxe et du semi-luxe.


« La pratique de la science utile : les applications de la chimie à l’industrie agro-alimentaire : un appareil pour extraire le sucre de betterave par le procédé du sucrate de chaux ». Bulletin de la Société d’encouragement, vol. 49, 1850, pl. 134 h.t..
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